samedi 21 juin 2014

Bibliographie du Casoar


Casoar. Le politique et le militaire. Avril 2014.

En présentant ce numéro exceptionnel du Casoar, le général Delort souligne que le politique et le militaire ont chacun leur rôle, chacun leur mission, ensemble dans le même but, et que leur coopération est actuellement facilitée par la confiance que la nation accorde à l'armée (sondage favorable de 79% en janvier).
Le professeur Vial note d'abord le caractère paradoxal du pouvoir militaire, dérogatoire à la démocratie, alors qu'il va de pair avec la tradition d'apolitisme de l'armée.  Il propose ensuite un historique des relations entre le politique et le soldat, qui ont évolué entre plusieurs modèles :
- la tradition absolue ou intégrale qui considère l'armée comme un outil entre les mains du politique; c'est la conception de la Convention qui ne veut "point de généralissime", de la républicanisation de l'armée qui fait suite à l'affaire Dreyfus,et de la reprise en main après le putsch de 1961,
- la tradition relative qui est celle du 19ème siècle et de 1914, où le chef militaire dispose d'une large autonomie dans la conduite de la guerre, selon le concept de Jomini et la pratique de Joffre et de Clémenceau, 
- la tradition réaliste où à la suite des échecs coloniaux, il y a partage desresponsabilités, grâce au Conseil de défense conforme au concept de Clausewitz, et à l'accroissement des responsabilités du Chef d'état-major des Armées (CEMA).
Dans ce cadre général, deux anciens CEMA (Lanxade et Georgelin) font état des relations qui se sont établies entre le CEMA et le Président. Alors qu'avant 1990 les décisions d'intervention extérieure étaient prises par le Président en liaison avec son chef d'état-major particulier (CEMP), lors de la guerre du Golfe en 1991, un Conseil de guerre journalier s'est tenu avec les 4 chefs d'état-major. Le CEMA, devenu la seule autorité opérationnelle a créé des organismes adaptés : DRM, COIA, COS. A partir de 1992, un conseil restreint se tient le mercredi avec le Président chef des Armées, le Premier ministre, les ministres des Affaires étrangères et de la Défense, le CEMA et le CEMP. Cette évolution a permis la prise de décisions rapides et l'arbitrage nécessaire en cas de positions divergentes ( réticences de Léotard et de Chevènement). Les responsabilités du CEMA ont à nouveau été élargies par les décrets de 2005, 
confirmés en 2013 après quelques hésitations.
Le professeur Louis Gautier de la Fondation Jaurès confirme que les relations civilo-militaires se sont apaisées. Le poids des militaires s'est accru et  les gouvernements de gauche ont pris les principales décisions d'intervention et engagé certaines réformes.
Le député Larrivé souhaite que soient respectées les prérogatives respectives de chacun ; le député Bacquet défend la spécificité militaire et le général Bentegeat souligne que le principe cedant arma togae reste la règle, sauf en cas d'ordre illégal; le militaire doit tenir son rang. Cependant le général Cot observe que certains chefs font carrière en évitant de contredire le ministre.
Les généraux Georgelin et Desportes définissent les principes qui doivent guider l'action des militaires : le principe de précaution impose que les capacités militaires soient suffisantes, le principe d'autonomie que le chef dispose de sa liberté d'action. Alors que souvent les objectifs des politiques sont ambigus et, à court terme, ceux des militaires sont clairs, concrets et à long terme.Le général Georgelin estime que le CEMA n'est pas un directeur d'administration comme un autre; son domaine d'action est plus large que "le coeur du métier", auquel certains cabinets civils voudraient le limiter; les ressources humaines, les finances et les relations internationales sont aussi de sa compétence.
C'est  l'avis de l'amiral Lanxade qui estime que le transfert des Ressources humaines au SGA est une grave erreur; l'efficacité opérationnelle dépend en effet de la mise en condition des forces, qui est une responsabilité du commandement.
Le général Cot partage le même point de vue; il considère scandaleux que l'on confie à des fonctionnaires peu compétents des responsabilités telles que le SGDN, la DGSE, la DICOD, le DPSD et la revue de Défense nationale. Le général Desportes rejoint ces critiques en observant les impasees capacitaires de notre système de défense.
Maurice Faivre, le 11 mai 2014

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